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13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 15:03

 

 

 

 

Nous partageons le bus qui nous mène de Santiago Del Estero à Salta avec une paire de locaux. Allongés sur les banquettes, ces sept heures de trajet ne sont pas les plus pénibles que j'ai connues. Arrivés à destination, nous prenons un colectivo.

J'avais oublié qu'en Argentine il fallait de la monnaie pour payer le bus. Une dame, nous voyant en peine, parlant un français accentué, nous propose de passer sa carte devant le lecteur en échange des quatre pesos exigés.

 

« Esteco, c'est ici que vous devez descendre » nous dit-elle.

 

Nous partons dans la mauvaise direction, la rue Esteco longe un canal, elle n'est pas droite comme celles que l'on trouve chez nous. Elle se termine pour laisser la place à une autre, pour reprendre finalement un peu plus loin. Nous ne comprenons pas la logique de cette calle et mettons un bon moment avant de nous retrouver sur le bon chemin. Nos sacs sont plus lourds, la sueur nous trempe le dos.

Enfin, nous y sommes ! La pancarte du San Jorge Hostel apparaît sous nos yeux.

Nous ouvrons le portillon métallique. Enrique nous accueille, nous présente un dortoir à quatre lits superposés. Le temps de redescendre à l'accueil pour présenter nos passeports :

 

« - Si çà vous dit, j' peux vous faire une chambre triple pour le même prix, 40 pesos par personnes, vous y serez bien mieux.

-Vendu ! »

 

Nous sommes idéalement placés, juste en face du Pasaje de Los Poetas, où nous verrons une fanfare d'adolescents jouer de la samba, une bande de gamins doués, parfaitement en rythme, des p'tits batteurs en herbe. Nous aurons aussi le droit à un concert hommage à Ariel Petrocelli, un poète disparu de Salta, au vernissage d'une statue à son effigie.

 

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La place est animée, nous n'avons à faire que deux pas pour voir les amoureux qui se bécotent sur les bancs publics, les marmots taper dans le ballon ou sur la tête de turc du quartier, les pré-pubères chevaucher leurs BMX, capuche sur la tête, utiliser le mobilier urbain pour faire des figures.

Ici, l'ambiance est populaire. Aucun danger.

 

Nous avons trouvé l'endroit où nous reposer, où faire une grève de bus d'une semaine.

 

Jérémy et Sarah sont arrivés juste après nous. Ils commencent un voyage de plusieurs mois. Ils s'apprêtent à louer une voiture pour partir visiter la région de Tucuman pendant trois jours. Ils sont de Bordeaux. Je suis content de pouvoir parler de ma bonne vieille ville, de nos quartiers, de nos bars-concerts préférés. Avec Jérémy nous avons le point commun d'être passionnés par l'écriture, la musique et surtout par Noir Désir. Nous passons des heures à discuter des compositions de Bertrand, du fait qu'il ne lui faille que très peu de mots pour imager son monde.

Nous étions au même concert quand il est remonté sur scène pour la première fois, au Festival des Terres Neuves ( voir article Bordeaux, Comme un symbole...) :

 

«On y était aussi ! On faisait parti du staff ! »

« Mes parents sont amis avec Bertrand et Romain ( chanteur d' Eiffel ) » rajoute Sarah.

«- C'était comme un symbole, c'était mon dernier jour de travail, j'étais sur le point de quitter Bordeaux où j' avais atterri six ans plus tôt avec les chansons de Noir Désir en tête.

-Ouai, c'était vraiment particulier, lui et Romain sont les meilleurs potes du monde. On sentait qu'il était très heureux de se réapproprier la scène, de retrouver son élément. Et cette reprise d'Iggy Pop !!!

-Et cette standing ovation !!! »  

 

Nous partons à la découverte de cette ville à l'architecture coloniale, entourée de montagnes. Nous doublons une manifestation, montons dans le téléphérique pour voir la vue aérienne de la cité. En haut, des centaines de touristes. Forcément, des bars. Curieusement, une salle de musculation à ciel ouvert.

 

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Un autre français arrive au San Jorge. Hervé travaille à Amsterdam, dans le centre d'appel d'une compagnie aérienne, il profite chaque année de billets d'avion au plus bas prix pour découvrir le monde. Nous allons ensemble à La Caldera, un village traditionnel situé au nord de Salta, à une heure et quart en bus local. La Caldera fut une étape sur la route des Incas.

Nous nous retrouvons dans La Taberna Del Ogro, le pub local. Nous sommes les seuls clients. Le patron, le ventre rond, le crâne dégarni, les joues remplies de feuilles de coca, se tient derrière son comptoir et regarde des reportages sur National Geographic. Son fils joue aux Simpson sur une vieille console de jeux vidéos. L'endroit est rustique. Des chaises blanches en PVC tutoient de vieux billards surdimensionnés. Nous buvons quelques bière dans ce lieu exotique. Nous trouverons un autre endroit pour manger, partirons ensuite nous balader dans des champs où des vaches et des taureaux nous observerons avec curiosité.

 

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Le soir nous nous faisons un barbecue à l'Hostel . Nous mangeons de la viande saignante, ( les argentins l'aiment trop cuite ) , du fromage de brebis et buvons du bon rouge.

 

L' équipe de baseball de Santiago Del Estero vient d'envahir le San Jorge. Ils sont une quinzaine. Même s'ils m'évoquent une bonne vieille équipe de vétérans sans abdominaux qui profite d'un week-end loin de leurs femmes pour faire la fête entre copains, ils viennent disputer une manche du championnat national.

A la tombée de la nuit, ils s'attablent tous ensemble, en mode gueuleton.

Pour nous, c'est l'heure de l'apéro. Un des pumas a laissé une guitare de coté. Avec son accord, je lui emprunte et défoule mes trois dernier mois d'abstinence. Au moment où je la repose, ils m'applaudissent puis m'invitent à leur table.

 

«-T'as mangé ?

-heu...

-Tiens, mange !

-Tu veux boire un coup ?

-...

-Tiens bois !

-Tu t'appelles comment ?

-Vicente ?

-Non sérieux, moi aussi !!! »

 

C'est parti pour une soirée de toute beauté. Ils sont déchainés. Il ne se passe pas deux secondes sans que quelqu'un n'éclate de rire. Lisandro, l'homme à la guitare et aux cheveux longs, jouent des sambas argentines qui ressemblent plus à des chansons d'amours qu'à de la musique brésilienne . Ils chantent tous bien, les uns font les basses, les autres les cœurs où les solistes. La musique semble être inscrite dans leur patrimoine génétique.

Les bouteilles de vin ne survivent pas longtemps. J'ai l'impression d'être une attraction qui les change de leur quotidien. Ils sont très curieux. J'ai plein de nouveaux potes !

 

«-Hey Vicente, viens jouer avec nous demain !

-J' ai jamais joué au baseball .

-C'est pas grave »

 

José ramasse un bout de bois, me le tend. Il roule en boule un feuille de papier journal, me la lance. Je la frappe sans conviction .

 

«-Tu vois que tu sais jouer !

-Mouai.

-T'es dans quelle chambre ?

-la 3.

-Demain matin, je te réveille à huit heure.

-Je vais à San Lorenzo demain.

-C'est très joli. Sais-tu que deux françaises ont été assassinées à San Lorenzo ? Il paraît qu'elles étaient journalistes et qu'elles seraient allées fouiner où il ne fallait pas.

-Ha bon ??? Nous n'avons pas eu la même version en France... »

 

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Lendemain matin. Ma tête résonne encore. Les mélanges ne sont pas bons. Il me semble que personne n'a frappé à notre porte.

Awa et moi partons passer la journée dans un parc naturel protégé. Nous ne savons pas ce que nous allons voir. Enrique nous a conseillé d'y aller quand nous lui avons demandé ce que nous pouvions faire dans le coin sans passer par une agence de voyage et sans aller trop loin.

C'est tout simplement une forêt qui ressemble à celles que nous avons chez nous, en plus dense. Elles est implantée sur les flancs de plusieurs colline. Nous nous y sentons seuls au monde, marchons le long du parcours de randonné, ne croisons que des vaches et des chevaux.

L'air est frais, sain. Après deux bonnes heures, nous nous asseyons en tailleur, en hauteur, pour nous délecter de la vue. Nous rentrons à la maison.

 

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Les gars reviennent de leur match :

 

«-Hey Vicente, t'es pas venu ce matin, on t'attendait ! On est en finale !

-C'est çà ouai ! Vous ne deviez pas me réveiller !? Bien joué !

-On l'a fait, mais tu étais encore trop saoul pour entendre », me répondent-ils en mentant et en rigolant.

 

Un dernier tour au musée, pour voir une des trois momies d'enfants sacrifiés, enterrés vivant, offerts aux montagnes par les Incas. Une dernière soirée, la veille de partir, dans le quartier fêtard de Salta et nous sommes fin prêts à reprendre la route.

Enfin, fin prêts n'est pas le terme exact, nous nous réveillons en sursaut après n'avoir dormi qu'une demie heure. Au moment de régler la note de l'hostel, je me rend compte que je n'ai pas gardé assez de pesos, je panique quelques secondes, voyant notre bus partir sans nous.

 

« Awa, t'as encore des euros ? »

 

Nous payons en euros et en pesos, sautons dans un taxi, arrivons à l'heure pile devant notre bus.

Nous allons à San Pedro, au Chili, dans le désert d 'Atacama. Mon petit doigt me dit que je ne vais pas voir ce voyage passer...

 

 

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